Désobéissance civile et non violence
Dans la Lettre de la prison de Birmingham écrite le 16 avril 1963 alors qu'il est arrêté pour une manifestation non violente, Martin Luther King répond à huit prêtres blancs de l'Alabama qui ont écrit quatre jours plus tôt une lettre intitulée Un appel à l'unité. S'ils admettaient l'existence des injustices sociales, ils exprimaient la croyance que la bataille contre la ségrégation raciale devait avoir lieu dans les tribunaux et non dans la rue. Martin Luther répond alors que sans des actions directes et puissantes comme celles qu'il entreprenait, les droits civiques ne seraient jamais obtenus.Il écrit : « attendre a presque toujours signifié jamais », et il affirme que la désobéissance civile est non seulement justifiée face à une loi injuste, mais aussi que « chacun a la responsabilité morale de désobéir aux lois injustes ».La lettre inclut la célèbre citation « Une injustice où qu'elle soit est une menace pour la justice partout » mais aussi les paroles de Thurgood Marshall qu'il répète : « Une justice trop longtemps retardée est une justice refusée »
Jusqu'à la fin de sa vie, Martin Luther King reste opposé à la radicalisation et à la violence prônée par le Black Power et souligne que « Les émeutes ne règlent rien » et considère ce moyen comme inefficace au-delà même de la nature opposée des émeutes à sa doctrine de non-violence, de morale et de foi.
« Si on dit que le pouvoir est la capacité à changer les choses ou la capacité à réussir ses objectifs, alors ce n'est pas le pouvoir que de s'engager dans un acte qui n'accomplit pas cela : et ceci quel que soit le bruit que vous fassiez et le nombre de choses que vous brûliez. »
Pour lui une guérilla comme celle de Che Guevara est une « illusion romantique ». Il préfère la discipline de la désobéissance civile qu'il définit non seulement comme un droit mais aussi un hommage à une énergie démocratique inexploitée. De même pour la pauvreté, il demande aux militants d'« utiliser tout le pouvoir de la non-violence sur le problème économique », même si rien dans la constitution américaine ne garantit un toit et un repas. Martin Luther King reconnaît la difficulté de la tâche mais demande à ne pas être intimidé par ceux qui se moquent de la non-violence. Il note la similitude de leur lutte avec celle de Jésus.
« L'opinion publique s'est retournée contre lui. Ils ont dit qu'il était un agitateur. Il utilisait la désobéissance civile. Il a refusé les injonctions de la loi. »
Pour Martin Luther, la non-violence est non seulement juste mais indispensable, car aussi juste que soit la cause d'origine, la violence signifie l'échec et le cycle de vengeance de la loi du talion, alors qu'il défend l'éthique de réciprocité :
« L'ultime faiblesse de la violence est que c'est une spirale descendante, engendrant la chose même qu'elle cherche à détruire. Au lieu d'affaiblir le mal, elle le multiplie. En utilisant la violence, vous pouvez tuer le menteur, mais vous ne pouvez pas tuer le mensonge, ni rétablir la vérité. En utilisant la violence, vous pouvez assassiner le haineux, mais vous ne pouvez pas tuer la haine. En fait, la violence fait simplement grandir la haine. Et cela continue… Rendre la haine pour la haine multiplie la haine, ajoutant une obscurité plus profonde à une nuit sans étoiles. L'obscurité ne peut pas chasser l'obscurité : seule la lumière peut faire cela. La haine ne peut pas chasser la haine : seul l'amour peut faire cela. »
Il affirme également que la fin ne peut justifier les moyens contrairement à la formule de Machiavel
« J'ai toujours prêché que la non-violence demande que les moyens que nous utilisons doivent être aussi purs que la fin que nous recherchons. J'ai essayé de rendre clair que c'est mal d'utiliser des moyens immoraux pour atteindre une juste fin. Mais je dois affirmer maintenant que c'est aussi mal, voir pire encore, d'utiliser des moyens moraux pour préserver une fin immorale. »
Dans sa Lettre de Birmingham, il répond même aux prêtres, qui l'accusent de créer des opportunités à la violence avec sa désobéissance civile pacifique dans un milieu raciste, que celui qui demande justice de manière non-violente ne peut être le fauteur de trouble :
« Dans votre déclaration, vous affirmez que nos actions, bien que pacifiques, doivent être condamnées parce qu'elles précipitent la violence. Mais est-ce une affirmation logique ? N'est-ce pas comme si vous condamniez un homme qui s'est fait voler parce que le fait qu'il possède de l'argent aurait engendré l'acte du vol ? »