Un séjour à Abuja, la capitale nous a permis de toucher de prêt les réalités du géant Nigeria. Regard sur une ville nouvelle qui se veut la capitale de la Cedeao.
Il est exactement 17h20 mn, ce 27 mai, lorsque nous foulons le macadam de Nnamdi Azikiwe International Airport Abuja. Welcome! Le service d’immigration se met en branle. Les documents de voyage sont passés au peigne fin. Situation oblige ! Boka Haram sévit dans l’Etat de Borno, au nord, dans le Maiduguri. Dans la foulée, un membre de la délégation du Niger est recalé. On lui colle un interrogatoire. Il est gardé au frais par ‘’immigration services’’. Oumarou Moussa, journaliste nigérien du quotidien gouvernemental ‘’Le Sahel’’ est arrêté à l’aéroport international d’Abuja (Nigéria) et refoulé dans son pays alors qu’il venait honorer une invitation de l’Institut Panos Afrique de l’Ouest et de l’Institute for Media and Society pour un Séminaire régional sur « Information et migrations ». Selon la police, le nom du journaliste figurerait sur une liste noire. Son nom, s’apparenterait à un certains membre de l’organisation terroriste. Sa participation au séminaire devient dès lors une chimère. On ne badine pas avec les entrées et sorties à Abuja. Cependant, une fois dans la ville, aucun agent des forces de l’ordre ne vous demande une pièce justificative d’identité comme en Cote d’ Ivoire où le contrôle de routine est la chose la plus régulière chez les forces de l’ordre.
Voir Abuja et se taire !
Contrairement à la grande campagne médiatique qui est faite quand on construit un pont en Côte d’Ivoire, à Abuja-le nom serait emprunté d’un village, proche de la ville de Suleija, située à une cinquantaine de kilomètres de la cité actuelle- on travaille dans le silence ou en silence. C’est selon. Sans faire de la fanfaronnade, la ville suit son développement. C’est une ville permanemment en construction qui est donnée de voir. Comment est née cette ville récente qui se développement à pas de géant ? En effet, pour ne pas favoriser une des trois ethnies principales la décision est prise en 1976 de transférer la capitale depuis Lagos, dominée par les Yorubas, dans une région neutre. En dessinant des lignes « X » sur la carte de Nigeria, l’ancien chef d’État, selon la carte poste de la ville, Murtala Mohammed (chef du gouvernement militaire fédéral du Nigeria du 29 juillet 1975 au 13 février 1976), tombe sur une zone peu peuplée et propice au développement. Cependant les travaux de construction ne débutent qu'en 1981. Le parlement est transféré en 1987 mais la ville n’est devenue officiellement capitale qu’en 1991.
Siege de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), Abuja, connait en ce moment se développe à rythme exponentiel. Les infrastructures sortent de terres comme des champignons. La voirie est en pleine construction. De la l’aéroport au centre ville distant de 40 km, une voie express de 3x3 est fièrement dressée. Donnant l’apparence des voies européennes ou américaines. Le hic, cependant, c’est que Abuja bénéficie d’un éclairage sommaire. La nuit, les rues sont noires. Il faut parfois, si ce n’est une exagération, se munir de lampe torche pour déambuler dans les artères de la ville doublement capitale.
Le secteur pétrolier, 95 % des recettes du pays
Dans la ville, tous les points distribution officiels de carburants sont fermés. Les conducteurs et propriétaires de camions citernes qui assurent le ravitaillement des stations services observe une grèves. Motif, l’Etat leur doit une énorme quantité d’argent. Une situation forte appréciée par les animateurs du Black Market qui prospèrent en pareille circonstance. Le prix du carburant est passé du simple au double. Le carburant est vendu à la criée. Le prix de ‘’One gallon ‘’ l’équivalent de 3,78541178 litres, oscille entre 1500 et 2000 Naira (3000 et 6000 FCFA). Alors que le Nigeria se classe comme le plus grand producteur de pétrole en Afrique et le 11e plus important dans le monde, avec une production moyenne de 2,28 millions de barils par jour (362×103 m3/j) et le huitième exportateur mondial de pétrole brut. Il envoie 42 % de ses exportations vers les États-Unis. Au stade actuel, les réserves représentent 43 années de production si aucun nouveau gisement n’est découvert… Un véritable monstre pétrolier tout simplement !
La hantise de boko haram !
Boko Haram, mouvement salafiste djihadiste du nord-est du Nigeria ayant pour objectif d’instaurer un califat et d’appliquer la charia, dont le nom officiel est Groupe sunnite pour la prédication et le djihad, impose son dictat dans la partie nordique du pays depuis 2002. Faisant du Nigeria une zone à haut risque. Il est bien évident que face à la grande campagne de communication et aux rapts réguliers des terroristes, personne ne veut affronter la mort en se rendant au Nigeria. Mais la réalité dans le pays de Muhammadu Buhari est tout autre. Le Nigeria vit et respire. La sécurité est renforcée et le contrôle aux postes d’entrées et de sorties du pays également corsé. Sur les 37 Etats qui forment la fédération, la nébuleuse Boka Haram ne frappait que dans trois Etats: Borno, Yobe et Adamawa. Mais dans sa dernière volonté de remettre un pays débarrassé des terroristes à Muhammadu Buhari, le 29 mai, Goodluck Jonathan, a commencé a frappé fort. La bande de terroriste s’est terrée dans les forêts du Borno. Les Etats de Yobe et Adamawa, selon les officiels Nigérians sont débarrassés des hôtes indésirables : Boko Haram.
Buhari, le nouvel espoir?
Il signe son retour aux affaires 30 ans après. Mais cette fois-ci par les urnes et non pas par les armes. Il lui aurait fallut échouer en 2003, 2007 et 2011 et se voir élire en 2015. Alors qu’il incarne et le nouvel espoir pour certains nigérians, pour d’autres c’est faire du neuf avec du vieux. Car son passage à la tête du Nigeria laisse certains souvenirs non moins heureux. En voici quelques uns. Alors qu’il est chef de l’État, Buhari est impliqué dans un ‘’scandale ‘’ concernant le sort de 53 valises, contenant prétendument 700 millions de dollars et détenues par l’émir du Gwandu, qui ont été dédouanées sans inspection sur le vol de l’émir en provenance d’Arabie Saoudite. En 20 mois à la tête du Nigeria, Muhammadu Buhari avait sous son égide, adopté nombre de décrets, dont certains étaient qualifiés d’attentatoires aux Droits de l’Homme. Son régime sera la cible de nombreuses critiques dans le monde, à l'image de la pièce de théâtre écrite par le premier lauréat nigérian du Prix Nobel, Wolé Soyinka, intitulée « Les crimes de Buhari », qui décrit un grand nombre de violations sous son régime militaire. Bref ! Mais avec ce retour et les circonstances de son arrivée, on ose espérer que les erreurs de son règne passé ne se répéteront plus pour le grand bonheur du peuple frère du Nigeria. D’ailleurs certaines déclarations du nouvel élu permettent de croire que l’espoir est permit. «Il faut mettre de côté la religion, la politique et toutes autres divisions afin d'écraser l’insurrection, attisée par des fanatiques insensés déguisés en musulmans ». Dixit Buhari. Un coup de fil certainement pour Boko Haram.